Portraits #2

Nouveau joujou
Dans la dernière série de photos que j'avais publié, j'avais exclusivement utilisé mon zoom pour attraper des portraits "volés", à l'insu de mes sujets. Avec une focale de 200mm, on peut se permettre de rester loin, de pêcher les portraits discrètement, à plusieurs mètres du sujet. En introduction de cette première série de photos, je disais combien il était facile de trouver des visages lorsqu'on est bien caché dans la foule.
Il y a quelques semaines, j'ai acheté un objectif, un des moins chers du marché : une focale fixe 50mm. J'avais lu que'avec une focale fixe on pouvait faire de jolie choses, mais n'étant pas un amateur très éclairé, je ne savais pas vraiment quoi. Dans le magasin, après avoir âprement essayé de négocier le prix de l'objectif, je le visse sur mon appareil, ouvre le diaphragme au maximum (f1.8) et shoote mon pote juste en face de moi : son visage et ses yeux sont parfaitement nets, mais l'arrière plan est totalement flou. C'est ça l'avantage des focales fixes : le montage optique est plus simple, cela permet de mieux transmettre la lumière, donc la quantité de lumière reçue est plus importante. Plus je fais rentrer de lumière dans l'objectif, plus la profondeur de champ est petite, je peux alors avoir un premier plan très net et un fond flou (ou l'inverse). Parfait pour faire ressortir le regard d'un portrait! Au contraire, mes deux zooms ont des ouvertures de diaphragmes faibles, je ne peux pas contrôler la profondeur de champ, et lorsque tout est net dans la photo, cela crée un effet d'écrasement qui ne permet pas de mettre en valeur les détails.

Viens vers moi
L'autre vertu du 50mm, c'est qu'avec une petite longueur focale, on est obligé de s'approcher pour cadrer un visage. Plus question de rester à 5,6 ou 10 mètres du sujet. Avec mon objectif tout simple, il faut que je m'approche à la distance d'une poignée de main pour obtenir un cadrage convenable. Il faut se faire remarquer, établir un contact, se faire accepter dans un espace proche, et faire accepter au sujet de devenir l'objet de la photo.
Ce n'est certainement pas un exercice facile. Les gens trouvent tout à fait normal de prendre des photos dans la rue lorsqu'il y a un événement insolite, mais il est bien plus compliqué de leur faire accepter qu'ils peuvent être à leur tour mes insolites. Tous n'acceptent pas. J'insiste toujours en leur montrant les photos que j'ai prises juste avant : d'autres visages simples, souriant, d'autres sujets, pour les rassurer, mais ça ne marche que rarement après le premier refus.

Cet exercice de communication était tout à fait nouveau, je l'appréhende un peu à chaque rencontre. La vraie récompense, ce n'est finalement même pas de faire des photos plus expressives, c'est que le regard de la photo est tourné vers moi, pour moi. Les enfants sont souvent plus enclins à jouer un rôle, peut-être ont-ils l'habitude d'avoir l'attention des adultes focalisée sur eux. Une fois que l'objectif est pointé sur eux, les sujets peuvent êtres moins naturels" que lorsqu'ils sont épiés à leur insu. Je ne demande jamais de jouer un rôle, après leur avoir demandé l'autorisation, je les photographie photos dans l'activité ou la pose qu'ils avaient, ça aide à rester naturel. Ensuite, je les remercie toujours, quelque soit le résultat. Je les remercie juste de m'avoir autorisé à les approcher naturellement et à garder un souvenir d'eux. Je suis parfois surpris, lorsque c'est eux qui me remercie! De quoi? Je ne sais pas...peut-être juste un forme de politesse.

En route
Avec mon nouveau jouet en main, je me balade dans les rues. Je marche plus doucement que d'habitude, pour avoir le temps de penser à la photo.
Quand je cherche à faire une photo, j'arrive rarement à réaliser ce que je veux. Par contre, il se passe parfois quelques chose qui relève de l'anecdote.
Est-ce que la photo est finalement mon prétexte pour provoquer une histoire? Ou l'histoire vient-elle avec la photo? J'ai mélangé un peu des deux pour vous montrer quelques visages parmi les milliers (milions?) que j'ai croisé.

Bonne balade!

Dans la foule de Tai Yuan Jie (Shenyang)

Style vestinmentaire à la chinoise : une veste pseudo "retro-grunge", des bijoux "shiny like diamonds", une casquette "Western Gangsta" dont le message est souvent cinquième degré.


Note sur les casquettes :
. Très en vogue : "BOY", en lettres énormes, porté quasi-exclusivement par les filles.
. "Comme des FuckDown" : énigmatique mélange d'anglais et de français, j'étais persuadé qu'il s'agissait d'une grossière erreur de traduction avant de trouver sur internet l'explication : il s'agit d'une vraie marque Néerlandaise -surement copiée illégalement en Chine - qui s'est amusée à mélangée l'accent français à l'expression branchée outre-atlantique "calm the fuck down".
. "ARALE" : je ne connaissais pas ce héros japonais avant d'arriver en Chine. heureusement, la foule de chinois qui portent la casquette ailée (si,si! un peu comme notre Astérix national) m'a permis de combler ma lacune. Là encore, le prêt-à-porter chinois ne fait pas dans la demi-mesure : les ailes sont immenses et les charactères "ARALE" clairement lisibles par les myopes...
. Panda : la version casquette aux couleurs de l'animal national fait fureur. En prime, vous avez l'aspect velour noir et blanc et les petites oreilles rondes sur le côté. Ne riez pas, les hommes la porte aussi!

Pause clope

Cuisto, dans une rue populaire de Shenyang

Serveuse

Lorsqu'elle nous a servi deux authentiques "Ice Tea" fait maison, elle y a mis tout son sérieux, comme dans un bar chic. Pourtant, la jeune Qie Zi (c'est ce que son badge indique) travaille dans un petit box, au carrefour poussiéreux d'un quartier populaire. (Quel quartier n'est pas populaire en République Populaire de Chine?).
Les observateurs ne se seront pas laissé berner : si elle nous a servi avec classe, c'est qu'elle est de la bonne école : regardez l'icône qu'elle porte à côté de son badge...!

Opera

Une actrice se prépare pour un spectacle traditionnel.

Maraîchère? Juste pour rire! (1. La soeur)

Un beau dimanche d'été, j'ai décidé de faire un petit (grand) tour à pied dans Shenyang. D'abord parce que je n'avais pas grand chose d'autre à faire ce week-end, ensuite parce que j'étais persuadé que les 2 grandes artères commerciales qui cerclent mon hotel, débordantes d'enseignes de luxe occidentales, n'avais rien à voir avec un vrai dimanche matin en Chine.
Devant un petit étale de fruits, deux gamins étaient en train de jouer. Je voulais les prendre en photo sur le vif de leur rigolade, mais en approchant, ils se sont prêtés au jeu de la pose...

Maraîcher? Juste pour rire! (2. Le frêre)

Coiffeur en outdoor

Votre passion c'est la création artistique capillaire? Mais vous rechercher également un job à pratiquer en extérieur?
La Chine a (comme d'habitude) ce qu'il vous faut : coiffeur d'extérieur.
Installez-vous dans un parc, avec deux tabourets (un pour l'artiste, un pour l'oeuvre), une tondeuse (veillez à bien recharger la batterie pour pouvoir terminer votre travail) et un peigne : ça y est, vous êtes apte au travail!

Histoire d'accordéon immobilier

Toujours dans un parc. Je m'approche d'un joueur d'accordéon. "À quoi ça ressemble un air d'accordéon chinois?" me demandez-vous. Oups, pas facile à décrire. Mais ça devait être plus curieux que désagréable, puisque je me dirigeais vers l'accordéoniste en question lorsque j'ai aperçu cette jeune demoiselle, debout en face du musicien. Les joueurs de musique sont souvent seuls dans les parcs. Ils jouent pour eux-même ; peut-être un peu pour les autres, mais ils ne cherchent pas forcément à être écoutés. Cette petite était-elle une fan d'accordéon pour rester plantée là, à l'écouter jouer?

En fait d'écouter, elle attendait qu'il finisse son air pour pouvoir lui tendre un exemplaire de son dépliant immobilier.
En fait de fan d'accordéon, il s'agissait d'une distributrice de publicité très patiente. Ou très consciencieuse. Elle a pour mission de distribuer son papier à TOUS les passants : elle distribue son papier à TOUS les passants, accordéonistes ou pas. Et puisque j'étais en train de marcher vers eux en regardant la scène, je rentrais immédiatement dans la classe des "passants". La voilà qui marche vers moi avec une promptitude toute juvénile ; elle me tend le même papier publicitaire et commence à débiter son baratin en chinois. En me regardant sourire avec amusement, elle doit percuter que, premièrement, je ne comprends rien à ce qu'elle dit, et que, deuxièmement, je n'ai pas vraiment le profil typique de celui qui voudrait vendre son appartement de Shenyang pour aller s'installer à Benxi.
Elle se reprend et semble se confondre en excuses précipitées. Ça m'amuse d'autant plus que ça "bouille" me fait rire, avec sa coupe se cheveux assymétrique (elle revenait du parc?) et ses mèchent qui suivaient le mouvement des lianes de peupliers.
J'ai sorti mon appareil photo ; elle s'est instantanément mise en "position", le visage neutre-naturel figé, prête à être immortalisée sur un daguerréotype. Je me suis cérémonieusement mis dans mon rôle de photographe et pris 3 clichés. Avant de regarder les photos sur mon appareil, à ma grande surprise, elle m'a chaleureusement remercié plusieurs fois... Êtes-vous prêts à remercier les chinois qui vous prennent en photo dans Paris?

Shooting manga

L'aversion de la Chine et des chinois pour le Japon ne les empêchent pas d'adhérer à des phénomènes nippons.
Ici, une séance de shooting dans un parc, sur un thème résolument "manga nippon".

Générations

Deux jolies et souriantes générations qui attendent le bus à l'ombre.

Charmant Shenyang

Fin de journée de printemps. La température est douce, le soleil est tiède. À la lumière du couchant, il semble neiger ; ce n'est que le pollen, qui envahit la ville pendant quelques semaine.
C'est le moment que choisi cette vendeuse pour faire une pose "weiboo" ou "QQ" (Facebook/messagerie instantanées autorisées par le parti).
Shenyang est bucolique me direz-vous? Ne vous y trompez pas : il s'agit seulement d'une invasion de pollen dans une rue bondée, bruyante et artificiellement luxueuse, sous un soleil prématurément rougit par la couche de pollution. Notre princesse ne cherche pas son prince charmant en laissant glisser son regard attendri au lointain ; non, elle tapote sur son portable. Alors pour l'authentique cliché romantique, on repassera!